Dossier : Rolex vs Grand Seiko
La concurrence la plus redoutable pour Rolex provenait autrefois d’autres grandes maisons suisses comme Omega et Breitling. Aujourd’hui, elle doit également faire face à la puissance de Grand Seiko. Désormais totalement indépendante de Seiko, cette maison horlogère légendaire a vu sa notoriété s’accroître considérablement depuis qu’elle a commencé à commercialiser ses montres en dehors du Japon.Dans quelle mesure Rolex doit-elle craindre ce concurrent ?
Rolex
L’histoire
L’histoire légendaire de Rolex a commencé bien avant celle de Grand Seiko, qui a fabriqué ses premières montres en 1960. Il faut cependant savoir que Grand Seiko est une émanation de sa marque mère, Seiko, qui a vu le jour dans les années 1880. Quoi qu’il en soit, les premières montres portant la marque « Seiko » ne sont apparues qu’en 1924.
Rolex peut donc se targuer d’être la marque la plus ancienne, et elle était déjà sur le devant de la scène à une époque où la plupart des Occidentaux ignoraient même l’existence de l’industrie horlogère japonaise.
Une vingtaine d’années après sa création, Rolex avait déjà accompli d’énormes progrès en lançant sa montre étanche, l’Oyster, portée par la célèbre nageuse d’endurance Mercedes Gleitze, première femme à avoir traversé la Manche à la nage. Elle a ensuite lancé son mouvement perpétuel à remontage automatique, perfectionnant ainsi le mouvement développé par l’horloger anglais John Harwood.
Tout au long du XXe siècle, Rolex s’est bâtie une réputation solide grâce à ses innovations incessantes, mais les années 1945 à 1956 ont été particulièrement prolifiques. Pratiquement tous les modèles lancés à cette époque, de la Datejust à la plongeuse Submariner, constituent aujourd’hui encore le cœur du catalogue Rolex.
Dans les années 1970, contrairement à Seiko, Rolex ne s’est jamais pleinement engagée dans la révolution du quartz.
Elle faisait partie d’un consortium de maisons suisses, comprenant Patek Philippe et IWC, qui a créé le mouvement Beta 21 à quartz pour concurrencer la nouvelle technologie japonaise. Mais elle n’y a jamais vu un réel intérêt, produisant des collections à pile dans des volumes relativement restreints, comme l’Oysterquartz Day-Date et la Datejust jusqu’en 2001, tout en conservant des mouvements mécaniques pour la majorité de ses montres.
Aujourd’hui, l’ensemble de la collection Rolex fonctionne avec des mouvements mécaniques internes à remontage automatique.
La coolitude
S’il ne fait aucun doute que Grand Seiko est aujourd’hui une maison de montres de luxe très respectée, à la réputation grandissante, elle est en revanche à la traîne par rapport à Rolex en ce qui concerne le côté tendance.
Parmi les célèbres et influents ambassadeurs de Rolex figurent des acteurs de premier plan tels que Paul Newman et Steve McQueen, des musiciens comme Eric Clapton, Rihanna et Ed Sheeran, ainsi qu’une pléiade de grands sportifs tels que Michael Jordan, Seve Ballesteros, Neymar, Alex Rodriguez et David Beckham (désormais égérie de la marque sœur de Rolex, Tudor).
Image : Phillips
Ajoutez à cela son caractère inaccessible, la plupart des nouveaux modèles Rolex faisant l’objet de longues listes d’attente, et vous obtenez l’une des marques de luxe les plus cool et les plus prisées qui aient jamais existé.
Le statut d’icône
Le catalogue de Rolex peut s’enorgueillir d’un nombre impressionnant de modèles emblématiques ayant été portés par des dirigeants du monde entier, des personnages de fiction, des alpinistes détenteurs de records et des stars hollywoodiennes. Aucune marque ne saurait rivaliser avec Rolex dans ce domaine.
De la Daytona à la Day-Date, portée notamment par le Dalaï Lama, il est fréquent de trouver une Rolex au poignet des plus grandes personnalités du monde. Mais ce statut d’icône n’est pas seulement lié aux personnes qui les portent. Il tient également à la qualité de fabrication et à la fiabilité qui ont permis à Rolex d’accompagner des explorateurs, des alpinistes et des plongeurs sous-marins dans les conditions les plus extrêmes, ce que la marque a fait savoir au monde entier à grand renfort de campagnes publicitaires à gros budget.
Un autre élément qui conforte son statut d’icône est le fait que l’espion de fiction James Bond portait une Rolex dans les romans de Ian Fleming et dans les premières adaptations cinématographiques. Omega s’est peut-être emparée de la franchise 007 dans les années 1990, mais pour de nombreuses personnes, la montre de James Bond par excellence restera toujours la Submariner.
Il est intéressant de noter que le James Bond incarné par Roger Moore a porté des montres Seiko dans deux films consécutifs, Moonraker et Rien que pour vos yeux, mais il s’agissait de simples Seiko à quartz et non de Grand Seiko.
Il serait pour le moins trompeur de la part de Grand Seiko de revendiquer un quelconque lien avec James Bond… mais il ne fait aucun doute que la marque pourrait gagner en notoriété grâce au cinéma.
Image : Bonhams
La qualité
Rolex fabrique tout en interne, ce qui n’est pas un mince exploit. Pour qu’une montre puisse être qualifiée de « Swiss made », il faut qu’au moins 60 % de sa production soit réalisée en Suisse. Or, chaque pièce d’une Rolex est non seulement fabriquée en Suisse, mais aussi en interne par Rolex elle-même, ce qui garantit que chaque montre qui sort de ses usines répond aux exigences extrêmes de la maison en matière de qualité.
Faisant pâlir d’envie les autres marques, Rolex possède sa propre fonderie afin de produire ses propres alliages d’or 18 carats et de platine à partir de matières premières. Même l’acier qu’elle utilise, le 904L, est plus résistant que l’acier 316L utilisé par la plupart des autres maisons horlogères.
En ce qui concerne les mouvements, tous les modèles Rolex actuels portent la mention « Superlative Chronometer » sur le cadran. Cela signifie que leur précision est d’abord certifiée par l’organisme indépendant COSC (Contrôle Officiel Suisse des Chronomètres), puis par Rolex elle-même, garantissant que les montres sont précises à -2/+2 secondes par jour, soit au moins deux fois plus qu’un chronomètre standard certifié par le COSC.
Le rapport qualité-prix
Bien que Rolex réponde à la plupart des critères attendus pour l’achat d’une montre de luxe, la question de son rapport qualité-prix reste sujette à débat. Après tout, en horlogerie mécanique, il existe une limite à la précision que l’on peut atteindre, et même si Rolex met en avant l’utilisation d’un acier de qualité supérieure, est-ce vraiment justifié de payer plusieurs milliers d’euros de plus pour une montre trois aiguilles par rapport à un modèle similaire chez Omega, Breitling ou, bien sûr, Grand Seiko ? À l’instar de nombreuses marques de luxe, vous payez le prix fort pour l’un des noms les plus prestigieux de l’industrie. Rappelons toutefois qu’une Rolex a tendance à mieux conserver sa valeur à long terme que la plupart de ses concurrentes.
Grand Seiko
L’histoire
Grand Seiko est née en 1960 de la volonté de proposer une version plus luxueuse de Seiko, la marque mère fondée à Tokyo en 1881 par Kintaro Hattori.
Baptisée initialement Seikosha (« précision » en japonais), le nom a finalement été abrégé en Seiko et est apparu pour la première fois sur le cadran d’une montre en 1924.
Bien que réputé pour son sens de l’innovation, le mode opératoire de Seiko a consisté pendant plusieurs décennies à copier les montres suisses et leurs mouvements et à les vendre à un prix plus abordable. Si cette stratégie lui a valu un énorme succès sur le marché japonais, il en a été tout autrement à l’international.
Pour réussir à l’échelle mondiale, Seiko savait qu’elle devait monter en gamme et développer sa propre philosophie en matière de design, en se démarquant de ses rivales suisses.
C’est là qu’intervient le designer Taro Tanaka, souvent considéré comme l’un des génies méconnus du monde de l’horlogerie. En 1959, Taro Tanaka, jeune diplômé en design, fut le premier designer qualifié à être recruté par Seiko. Il s’attela à l’élaboration d’un ensemble de principes horlogers appelés « La grammaire du design ».
Ceux-ci comprenaient trois principes fondamentaux, dont l’un exigeait que tous les boîtiers de montre soient uniques, en excluant les boîtiers ronds génériques qui caractérisaient le style suisse de l’époque. C’est de là que les montres Grand Seiko tirent leur style géométrique distinctif, aux arêtes nettes, dont on dit qu’il s’inspire de l’armure des samouraïs et qui est apparu pour la première fois sur le modèle 44GS.
Ces principes, finalisés en 1967, ont d’abord été appliqués aux lignes Grand Seiko et King Seiko avant de s’étendre aux collections Seiko d’entrée de gamme, qui ont été exportées dans le monde entier.
À la fin des années 1960, la notoriété des montres Seiko avait considérablement progressé, et ce n’était pas seulement grâce à l’apport de Taro Tanaka. La maison Seiko avait été choisie comme chronométreur officiel des Jeux olympiques de Tokyo en 1964, et la marque en avait profité pour lancer une campagne marketing monumentale. Les militaires américains engagés dans la guerre du Vietnam sont revenus chez eux avec des Seiko qu’ils avaient achetées en Extrême-Orient, soulignant leur précision et leur fiabilité au combat.
Au début des années 1970, Seiko était une marque connue pour avoir inauguré l’ère du quartz (son Astron était la première montre à quartz au monde) et pour avoir inventé l’un des premiers chronographes automatiques au monde.
Image : Bonhams
Quant à Grand Seiko, dans un contexte de déclin des montres mécaniques, elle a commencé à tourner au ralenti en 1976, malgré les performances remarquables de ses modèles dans les compétitions suisses de chronométrage, au grand dam des maisons helvétiques.
Cela dura jusqu’à ce que la première Grand Seiko à quartz soit introduite en 1988. Ce n’était pas une montre à quartz ordinaire, mais une montre d’une précision incroyable de 10 secondes par an, bien supérieure à celle des autres mouvements à quartz.
La marque a ensuite lancé un mouvement à quartz encore plus précis avant que la réapparition des montres mécaniques dans les années 1990 ne conduise à la conception et à la fabrication de la série 9S5.
Image : Phillips
Lancé en 1998, il s’agissait du premier calibre mécanique de Grand Seiko en 20 ans et il a donné à la marque un élan inespéré. Après tout, au début de l’ère du quartz, les publicités de Seiko affirmaient avec force « qu’un jour, toutes les montres seront fabriquées de cette manière ».
Cependant, ce n’est que plusieurs années plus tard que Grand Seiko réalisera sa plus grande prouesse technique. En 2004, la marque a dévoilé son calibre hybride Spring Drive, qui associe un ressort-moteur traditionnel à un régulateur électronique. Après plus de vingt ans de recherche et développement, ce calibre a fait l’objet de 600 prototypes et constitue la famille de mouvements la plus avancée de la marque.
Après avoir internationalisé sa commercialisation en 2010 et pris son indépendance vis-à-vis de sa maison-mère en 2017, Grand Seiko est désormais bien placée pour s’attaquer aux géants helvétiques du luxe.
L’écart de qualité entre Grand Seiko et Seiko ne cesse de se creuser, ce qui se reflète même dans l’emplacement de ses magasins. Alors que Seiko demeure une marque de grande distribution, vous trouverez des boutiques Grand Seiko dans les rues les plus chics, comme Bond Street à Londres ou Rodeo Drive à Los Angeles, à quelques pas seulement de Patek Philippe, Chopard et Breguet.
Grand Seiko fait désormais partie du cercle très fermé de ces grandes maisons, et elle le mérite amplement.
La coolitude
Grand Seiko pourrait choisir la solution de facilité et faire appel aux célébrités les plus en vue pour promouvoir ses montres, comme c’est le cas pour de nombreuses marques de luxe. Mais fidèle à son style japonais sobre et conservateur, elle semble se contenter de laisser le monde découvrir ses produits sans tambour ni trompette.
Aussi, alors que Rolex doit principalement son statut de marque cool aux célébrités, d’hier et d’aujourd’hui, qui la portent, Grand Seiko se fraie son propre chemin vers la coolitude.
En effet, pour certains, le fait même que Grand Seiko évite de dépenser son argent pour recruter des ambassadeurs de marque en fait une marque extrêmement cool.
C’est l’antithèse d’une marque « bling bling ». Si vous voyez quelqu’un porter une Grand Seiko, vous avez la certitude qu’il s’agit d’un passionné d’horlogerie qui s’intéresse moins au nom imprimé sur le cadran qu’à ce qu’il y a en dessous.
Le statut d’icône
Grand Seiko est-elle une icône ? A priori, pas encore. Est-elle légendaire ? Oui, et pour beaucoup, c’est tout aussi souhaitable.
S’il manque quelque chose à Grand Seiko, c’est une montre « vedette », un modèle immédiatement identifiable, à l’instar d’une Royal Oak, d’une Reverso ou d’une Daytona. Mais les montres Grand Seiko se conforment aux principes de conception de Taro Tanaka, évoqués précédemment, ce qui confère à chaque collection une esthétique similaire.
Ce que Grand Seiko a de particulier, c’est sa forte philosophie de marque, son charme exotique et ses traditions ancestrales qui tranchent avec celles de ses homologues suisses.
Et il est difficile de ne pas aimer une marque qui prend soin de ses horlogers au point de les faire bondir de leur siège toutes les heures pour s’adonner à une séance bienfaisante de tai-chi.
La qualité
La réputation du savoir-faire exceptionnel qui entre dans la fabrication des montres Grand Seiko ne cesse de croître, et des concepts tels que le polissage « Zaratsu », qui permet d’obtenir une surface plane et lisse semblable à un miroir, sont désormais connus des amateurs d’horlogerie.
Grand Seiko a également beaucoup investi dans ses mouvements internes, qui sont testés selon la norme d’inspection Grand Seiko, un processus plus rigoureux que celui du COSC, l’organisme suisse chargé de tester les chronomètres. Alors que le COSC autorise une déviation quotidienne de -4/+6 secondes pour qu’un mouvement soit certifié chronomètre, Grand Seiko n’autorise qu’une déviation de -3/+5 secondes. Le COSC teste les montres dans cinq positions différentes, contre six positions chez Grand Seiko.
Enfin, Grand Seiko teste les mouvements avec deux variations de température contre une seule pour le COSC.
Les montres les plus remarquables du catalogue Grand Seiko sont celles qui sont fabriquées dans le prestigieux atelier Micro Artist Studio, situé dans la ville de Shiojiri. C’est là qu’une équipe d’horlogers triés sur le volet réalise certains des cadrans les plus sublimes qui soient, ainsi que des gravures complexes sur la lunette et des finitions de mouvements qui rivalisent avec tout ce qui se fait de mieux à Genève ou à Glashütte.
Le rapport qualité-prix
Avec des prix moyens bien inférieurs à ceux de Rolex, Grand Seiko offre un rapport qualité-prix exceptionnel. Il y a seulement deux ans, par exemple, vous pouviez acheter un modèle Spring Drive en titane à heure et date avec un cadran « Snowflake » magnifiquement texturé pour 5 800 $ à l’état neuf.
Si la même montre arborait la mention « Rolex » sur le cadran, vous pourriez vous attendre à payer au moins 2 000 $ de plus. Aujourd’hui, cette montre coûte 6 200 $, mais c’est encore une somme raisonnable pour un garde-temps de cette qualité.
Les Grand Seiko d’occasion se vendant généralement à un prix bien inférieur au prix du neuf, elles méritent que l’on s’y intéresse de près. Aujourd’hui infiniment supérieures aux Seiko standard, les Grand Seiko sont des montres pour la vie, qui comptent parmi ce que l’horlogerie japonaise a de mieux à offrir, et leur réputation ne cesse de croître d’année en année.
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