Nouvelle vs Ancienne Rolex GMT-Master
Lorsque Hans Wilsdorf décida de fonder une entreprise horlogère en 1905, il se fixa un objectif: fabriquer la meilleure montres au monde. Les premières publicités de Rolex clamaient haut et fort toutes les façons dont les montres de Wilsdorf étaient testées, la quantité de records de précision qu’elles avaient battues, leur étanchéité, leur résistance à la poussière ou au magnétisme - tout et n'importe quoi finalement. A propos de la GMT-Master le matériel promotionnel de Rolex déclare: "Si vous pilotiez le Concorde demain, vous porteriez une Rolex." Les avions à réaction supersoniques et les montres-bracelets mécaniques étant devenus obsolètes, la collection moderne Rolex peut-elle encore répondre a l’objectif initial de Wilsdorf d'être le meilleur?
Visionnez notre vidéo sur la Rolex GMT-Master 1675 et GMT-Master II 116719 BLRO
Pour un observateur occasionnel, Rolex est le roi des horlogers. Il est facile de comprendre pourquoi: le logo de la marque est une couronne, pour commencer, et le marketing ne ressemble à rien de ce qui se fait dans l'industrie. Mais la vérité est un peu différente, un peu plus complexe. A vrai dire, 1905 était très tardif pour démarrer une entreprise de montres. Blancpain, la plus ancienne marque de montres encore en activité, a été fondée près de deux siècles plus tôt. Omega, probablement le principal concurrent de Rolex, a une longueur d'avance de plus d'un demi-siècle.
Alors, quand vous n'avez pas le passé et l’héritage de votre côté, que faites-vous pour vous faire un nom? Vous faites ce que font tous les jeunes entrepreneurs pleins d’espoir: vous innovez en présentant des surprises, en brisant le moule. Le moyen le plus rapide d'innover consiste à exploiter les idées existantes et à les utiliser de manière novatrice.
La Rolex GMT-Master classique de 1675 représente l'attitude innovante d'Hans Wilsdorf
C'est ce qu'a fait Wilsdorf, alors âgé de 24 ans. À l'époque, les montres de poche étaient réservées aux hommes et les montres-bracelets, connues à l'époque sous le nom de «bracelets», aux femmes, et tout cela importait peu pour lui. Faisant fi de ces codes, il s'est procuré le plus petit mouvement présentant la meilleure performance - provenant d'une société appelée Aegler, que Rolex a achetée à titre définitif en 2004 - et s'est engagé à le faire entrer dans tous les concours de précision. Parce que les montres-bracelets n'avaient jamais été soumises aux concours auparavant, elles étaient considérées comme parmi les plus précises, par défaut.
Ensuite, il se mit à développer un boîtier qui ferait la une des journaux grâce au même raisonnement sorti de nul part: bien que les montres présentant une résistance à l’eau ne furent pas nouvelles, elles n’étaient pas particulièrement bien pensées. Les joints à ajustement serré, les couvercles de serrage et le verrouillage des boitiers secondaires étaient monnaie courante. Certaines montres étaient plus proches de la marque avec des lunettes vissées, des boîtiers vissés ou des couronnes vissées, mais jamais les trois. La Rolex Oyster fut la première à les combiner ensemble.
La petite aiguille GMT, la couronne pointue et le cadran doré sont des incontournables
Même les coups marketing ou l’Oyster qui était exposée fonctionnant plongée dans des bocaux à poissons n'était pas nouvelle - la première montre de poche submersible connue a été exposée de la même manière lors de la Grande exposition de 1851 à Londres.
De nombreuses autres innovations offertes par Rolex ont été pensées de la même manière: le mouvement à remontage automatique existait déjà, mais Rolex l'a perfectionné avec le poids du rotor en rotation libre; le calendrier perpétuel était utilisé depuis des siècles, mais Rolex a été le premier à construire une montre présentant juste la date; Les montres de poche de 24 heures n’étaient pas rares, mais Rolex a été le premier à associer une aiguille de 24 heures à un ensemble standard de 12 heures.
C'est pour ça que Rolex est le roi. Comme Apple, c'est une marque qui reprend des fragments d'idées non polis et les associe pour créer des résultats simples et élégants, le genre de choses qui vous font taper sur le front et vous faire dire : "pourquoi n'y ai-je pas pensé!"
Une collection vintage n'est pas complète sans une GMT-Master
La question est la suivante: la Rolex d’aujourd’hui est-elle le même innovateur que la Rolex d’hier? En comparant ces années 1960 et 1675 avec un modèle 116719 BLRO moderne, il serait facile de faire abstraction des finitions lisses et brillantes de la contrepartie moderne comme une transition de la fonction à la forme. Le problème, c'est que la technologie a délaissé la montre-bracelet mécanique, laissant des entreprises comme Rolex dans un vide entre le passé et le présent. Comment pouvez-vous vraiment innover avec quelque chose qui est déjà dépassé?
Une affaire aussi délirante n’aurait pas arrêté Wilsdorf, et cela n’arrêtera pas Rolex non plus. La différence est la suivante : en l’absence d’excellence technologique à préserver, qui a depuis longtemps été en faveur de l’informatique, Rolex peut se lancer ses propres défis. A la poursuite de l'excellence, elle peut se donner la peine de réaliser ce qui était auparavant irréalisable.
Qui aurait pensé que cela pourrait se traduire par quelque chose d'aussi simple qu'une lunette ? Cela a été un élément de référence pour la GMT-Master depuis le début avec la montre inaugurale 6542. Cette montre avait une lunette fabriquée à partir du précurseur du plastique, la Bakelite, mais elle était tout simplement trop fragile, trop friable. La lunette en aluminium que nous connaissons et aimons l'a remplacée et a bien servi Rolex pendant des décennies, mais en 2005, la donne a changé. La GMT-Master II 116718 LN a reçu le premier cadran en céramique ornant une montre Rolex.
La version moderne: la GMT-Master II est raffinée et appréciable, grâce aux outils de production modernes
Entièrement noire, cette lunette en céramique offre une résistance aux rayures, à la décoloration et des chiffres incroyablement précis remplis d'une couche d'or. Sympa, certes, mais assez ordinaire à ce stade, et bien loin de l’audacieuse lunette rouge et bleue de l’ancienne.
Rolex se trouvait ainsi confronté à un défi de taille. Une lunette en céramique bicolore aurait facilement pu être fabriquée à partir de deux moitiés collées l'une à l'autre - c'est ainsi que sont fabriqués les fausses -, mais cela n'a tout simplement pas fait l’affaire pour le roi des horlogers. Non, Rolex souhaitait confectionner deux couleurs à partir d'une lunette. Les cadres en bakélite et en aluminium étaient formés d’une seule pièce, et il en serait de même ici.
La lunette bi-couleur est fabriquée en une pièce, utilisant une technologie de pointe spécifique à Rolex
La première étape consistait à comprendre la transition entre les couleurs, ce que Rolex fit avec la BLNR 116710 noire et bleue de 2013, mais le véritable défi restait à venir : comment combiner le rouge et le bleu. Voyez-vous, la lunette en céramique se présente à l’origine comme une couleur vert pâle et mentholée, à laquelle un pigment est ensuite ajouté. Il serait pratiquement impossible de colorer chaque moitié de la lunette séparément sans avoir des problèmes d'alignement comme un chevauchement de couleurs ou, pire encore, un espace. Ainsi, avec la BLNR, Rolex a divisé le processus de pigmentation en deux étapes : la première pour colorer la lunette en bleu et la seconde pour colorer la moitié supérieure en noir. Le noir étant plus foncé que le bleu, le pigment bleu ne transparaît pas. Le problème, c'est que cela ne fonctionnerait pas avec deux couleurs d'un ton similaire, comme le bleu et le rouge - la couleur additive serait le violet.
C'est peut-être un peu différent, mais la GMT-Master II 116719 BLRO emprunte beaucoup à la 1675
Comme pour toutes les innovations de Rolex, la solution semble plus simple que prévue. Le processus final a vu le rouge placé en premier sur l’ensemble, dans une nuance qui avait déjà du bleu. Ainsi, lorsque le bleu était posé sur le dessus, il gardait une nuance plus bleue que violette. Regardez bien la lunette et vous verrez que le rouge a du bleu et le bleu du rouge, mais dans l'ensemble, cela fonctionne incroyablement bien. C'est une solution très propre. Très ... Rolex.
En faisant référence à l'attitude disruptive de Hans Wilsdorf, certains pourraient dire que la Rolex d'aujourd'hui se repose sur ses lauriers, mais c'est un peu injuste. C'est un secteur très différent aujourd'hui, qui répond à un besoin très différent, et Rolex ne pourrait tout simplement pas survivre avec la même approche cavalière qu’a l’époque. Avec des joyaux comme le Sky-Dweller et son mouvement intelligent, la Deepsea et son boîtier presque indestructible et la GMT-Master II et sa lunette en céramique bicolore, il semble que Rolex cherche toujours le moyen de faire les choses différemment sans tout chambouler pour autant. Mieux vaut cela que des éditions limitées sans fin de la même montre ...
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