Pourquoi Rolex déteste-t-elle ENCORE le football ?

Le tout premier ambassadeur de la marque Rolex n'était ni une star de cinéma, ni un astronaute, ni même une personne connue de tous. C’était une nageuse d'endurance de 26 ans, Mercedes Gleitze, qui a porté une Rolex Oyster lors de ses tentatives de traversée de la Manche à la fin des années 1920. (Lorsque Gleitze a finalement établi le record, elle ne portait pas réellement la montre, mais c'est une autre histoire).

Depuis, Rolex a fait appel à des dizaines de personnalités triées sur le volet pour promouvoir ses montres, ou du moins pour utiliser leurs célèbres exploits dans ses campagnes publicitaires.

Des champions de golf aux réalisateurs oscarisés, en passant par les aviateurs qui battent des records et les chanteurs d'opéra comme le grand ténor espagnol Placido Domingo, les visages de Rolex sont aussi variés que ses garde-temps.

La marque nous a même surpris au fil des ans avec quelques choix hors normes.

Frederick Forsyth, auteur à succès de The Day of the Chacal, est apparu dans plusieurs publicités Rolex un peu bizarres dans les années 1980, exhibant sa Day-Date en or jaune et parlant autant de son dernier livre que de sa montre. Il est difficile d'imaginer une publicité Rolex Explorer moderne dans laquelle, par exemple, Amélie Nothomb parle de son dernier roman à succès.

Mais lorsqu'il s'agit de footballeurs (ou de « joueurs de soccer », comme nos amis américains aiment les appeler), Rolex est inflexible. Le football, semble-t-il, n'a jamais été assez exclusif pour la couronne. C’est à se demander si cette vieille marque un peu prétentieuse préférerait plutôt sponsoriser l'actuel champion nord-coréen de jeu de dames que des joueurs comme Ronaldo et Neymar.

Rolex ne lâche rien

L'aversion de Rolex pour le football était compréhensible il y a quelques décennies, lorsque ce sport était à peu près aussi glamour qu'un sandwich jambon-beurre, et à l'époque, ce n'était pas la seule marque de montres de luxe qui boudait ce sport. Alors que les footballeurs faisaient la publicité de produits très divers comme des voitures ou de l'après-rasage, ils n'intéressaient pas les hautes sphères de l'industrie horlogère.

Dans l'Angleterre des années 50, les footballeurs gagnaient à peu près le même salaire que les enseignants et n'auraient certainement pas passé leur temps libre à dépenser sans compter sur la très chic Bond Street ou à peaufiner leur faux bronzage dans des spas. Ils prenaient le bus pour aller à l’entraînement, vivaient dans de petites maisons, et même Pelé, dans les années 1970, n'aurait pas conduit une voiture de sport de luxe.

Mais les temps ont changé. Actuellement, trois des cinq athlètes les mieux payés au monde sont des footballeurs et le salaire hebdomadaire moyen d'un footballeur de Premier League équivaut au prix d'un chronographe Royal Oak flambant neuf (en or évidemment) !

Quant aux supporters, le football n'est plus l'apanage des classes populaires. Les détenteurs d’un abonnement annuel dans les grands clubs peuvent opter pour des forfaits de luxe qui offrent des places de choix avec des repas gastronomiques plutôt que de se retrouver debout dans des gradins qui sentent l'urine en train de manger un hot-dog.

D'autres horlogers de luxe ont progressivement reconnu ce changement socio-économique et ont assoupli leur position. Un coup d'œil aux ambassadeurs actuels d'autres marques révèle une acceptation croissante du monde du football, avec Lionel Messi chez Audemars Piguet, Kylian Mbappé chez Hublot (la marque qui s’est rapprochée du football comme aucune autre), Ronaldo chez TAG Heuer et David Beckham, le plus prisé des ambassadeurs, chez Tudor, la marque sœur de Rolex, après qu’il ait flirté avec Breitling.

Mais Rolex ? La marque a été aussi têtue qu'une vieille mule que l’on essaye d’emmener dans une usine de nourriture pour chiens.

Les footballeurs portent des Rolex de toute façon !

Bien sûr, cela ne signifie pas que l'indifférence dont Rolex fait preuve à l'égard des footballeurs est réciproque. Au contraire, les joueurs de haut niveau, loin d'ignorer Rolex, qui déteste le football, semblent porter la marque plus que jamais.

Bien qu'il soit l'ambassadeur le plus connu de la marque Tudor, l'interdiction de porter une Rolex n'est manifestement pas inscrite dans le contrat de David Beckham. Cette icône du style, qui s'est retirée des terrains en 2013, a été vue portant toute une série de modèles, d'une Yachtmaster en or jaune à une Sky-Dweller en or rose.

Et les détaillants officiels Rolex ont manifestement des footballeurs tout en haut de leur liste d'attente, puisque le modèle « gaucher » de la GMT-Master II, dévoilé lors du Watches & Wonders de cette année, est apparu au poignet de plusieurs footballeurs quelques semaines après son lancement. Karim Benzema (Real Madrid), Declan Rice (West Ham) et Zlatan Ibrahimovic ont tous été vus portant la très demandée « Sprite », comme elle a été surnommée.

Un timide premier pas

Malgré tout son conservatisme, Rolex aime créer la surprise de temps à autre. La probabilité qu'elle se rapproche du football est à peu près aussi élevée que celle de voir des humains atterrir sur Mars, en d’autres termes elle est faible mais pas impossible.

Peut-être qu’en choisissant Beckham comme ambassadeur de la marque Tudor, Rolex cherche à tâter le terrain pour voir si un footballeur est compatible avec les montres de luxe, même si cet ancien joueur est aussi connu pour son goût du style que pour sa carrière sportive. Beckham reste le seul footballeur dans les petits papiers de Tudor, mais pas son seul athlète, puisqu'elle a signé le rugbyman des All Blacks Beauden Barrett.

Dans le monde d’aujourd’hui, l'aversion persistante de Rolex pour le football n'a plus de sens. Cela donne juste l'impression que la marque est un peu snob. Ce n'est pas comme si tous les amateurs de football pouvaient soudainement s'acheter une Rolex flambant neuve, ce que l'on semble craindre.

En cette année où la Coupe du monde se déroule dans l'une des régions du monde les plus friandes de montres de luxe, il est certainement temps pour Rolex de montrer un peu d'amour pour le football et de tendre enfin la main au « Beautiful Game ».

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